Texte intégral du livre :

"LA FEE DES GREVES" par Paul Féval Liens vers pages suivante, précédente et sommaire du livre en bas de page.

La Fée des Grèves de Paul Féval

contraire, tu prendras un mari et tu l'aimeras. Tu auras des enfants et tu les adoreras. Que restera-t-il pour ton pauvre vieux père ?
-Ce qui restait à votre mère tant aimée quand vous fûtes époux et que vous devîntes père. Une larme tomba sur la barbe blanche du chevalier.
-Ma mère ! murmura-t-il ; Dieu m'est témoin que je l'aimais. Oh ! Reine ! pourtant ma mère est morte seule au manoir du Roz, pendant que j'étais en guerre. Promets-moi que tu seras là pour me fermer les yeux !
Reine ne répondit que par des baisers plus tendres. Ç'avait été une scène touchante, lorsque le vieux proscrit, après trois jours entiers d'attente, avait revu enfin sa fille, escortée par ses fidèles vassaux.
Avant de la baiser, il avait mis un genou en terre pour remercier Dieu.
Puis, il l'avait serrée contre sa poitrine déjà creusée par la faim.
Puis encore, il avait mangé avidement, au milieu des Le Priol, qui avaient des larmes plein les yeux à l'idée de ce qu'avait souffert leur pauvre seigneur.
Reine le servait, lui présentant le pain et la coupe pleine.
On les avait laissés seuls après le repas.
Il y avait déjà longtemps qu'ils s'entretenaient ainsi.
Un silence se fit. Le chevalier contemplait sa fille. Un sourire vint à sa lèvre austère.
-Je suis jaloux de lui ! murmura-t-il.
-Lui qui vous aime tant, mon père !
-Et crois-tu que je ne l'aime pas, moi, pour lui donner ainsi mon cher trésor ! s'écria le proscrit qui enleva Reine dans ses bras et la posa sur ses genoux comme un enfant. C'est un bon soldat, c'est un coeur généreux ; je veux bien qu'il soit mon fils. Mais je te le dis, ma Reine bien-aimée, la vieillesse est un long supplice. Nous n'acquérons plus jamais, et toujours nous perdons jusqu'au seuil de la tombe. Voici un homme fort, jeune, heureux, souriant aux promesses que l'avenir prodigue. Le monde est à lui ! que fait-il ?
Il vient demander au vieillard dépossédé une part de son bien suprême. Le riche a besoin de l'obole du pauvre : ainsi est la vie !
Il baissa la tête, et ses cheveux blancs inondèrent son front.
Reine était devenue triste à l'écouter.
-Tu l'aimes donc bien ! demanda-t-il brusquement.

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