Texte intégral du livre :

"LA QUESTION DE L'INSULARITE DU MONT SAINT-MICHEL" par l'abbé J. Descottes. Liens vers pages suivante, précédente et sommaire du livre en bas de page.

Nivèlement général (il y a environ 135 ans), cette fluviole vint passer tout près, au nord: son fond était à 21 pieds au-dessous des plus hautes mers de la baie qui sont elles-mêmes à 4.2 pieds au-dessus des plus basses. Même par ce fossé artificiel, fort précaire d'ailleurs, on n'obtiendrait donc l'isolement que pendant la moitié du temps, d'ailleurs surtout à des heures creuses.

La plupart des auteurs qui ont écrit sur ce sujet ne voient pas la vraie position du problème qu'ils cherchent à résoudre parce qu'ils ne tiennent compte que de l'action des rivières. Si cette action contraria souvent les entreprises d'utilisation des lais de mer, elle est pourtant minime en comparaison de l'action globale de la mer, qui leur est plutôt favorable.

Pour comparer les puissances des deux agents, - mer et rivières - il faut comparer les masses d'eau qu'ils déplacent sur l'estran au cours d'une année moyenne. J'ai fait cette .cornparaison, par une étude spéciale, pour la Rance maritime. Dans cette dernière les marées meuvent mille fois plus d'eau que n'en apporte la rivière d'eau douce (800 milliards de mètres cubes contre 800 millions en chiffres ronds). Or, si les rivières tributaires de la baie du Mont-Saint-Michel drainent environ trois fois plus de surface que la Rance (3.000 au lieu de 1.000 kms), l'estran de la baie est environ vingt fois (300km2 au lieu de 15) plus étendu que la Rance maritime Ainsi, le jeu des marées dans la baie déplace de 6.000 à 7.000 fois plus d'eau que les: fluviales.

Ajoutons à cela que la mer est souvent houleuse et qu'elle monte toujours plus vite qu'elle ne descend (durée du flot en grande marée : 5 h.; durée du jusant : 7 h.). Comme la force d'entraînement d'un courant d'eau est proportionnelle au carré de sa vitesse, on se rend compte que le flot est beaucoup plus actif que le jusant, - même aidé des rivières. On comprend ainsi que le flot efface les petites rigoles que les fluvioles creusent dans le sable au jusant, avec. la même facilité qu'il aplanit les estivales constructions que nos enfants

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