Texte intégral du livre :

"LA FEE DES GREVES" par Paul Féval Liens vers pages suivante, précédente et sommaire du livre en bas de page.

La Fée des Grèves de Paul Féval

masque qui laisse passer les rayons lumineux, mais qui les disperse, qui les confond, qui les brouille comme ferait un épais et triple voile de mousseline.
On y voit, la lumière est même la plupart du temps vive et blessante pour l'oeil, répercutée qu'elle est à l'infini par les molécules blanchâtres de la brume. Mais cette sensation de la vue est vaine ; on perçoit le vide brillant, le néant éclairé.
Les objets échappent ; toute forme accusée se noie dans ce milieu mou et nuageux.
Nous avons dit le mot, du reste, et aucune comparaison ne peut rendre plus précisément la réalité. Collez votre oeil à la vitre dépolie et regardez le grand jour au travers.
Vous serez ébloui sans rien voir.
La nuit, le peu de lumière qui descend du firmament suffit toujours à guider les pas. Dans le brouillard, rien ne guide, rien, et le vertige nage dans ce blanc duvet qui provoque et lasse les paupières.
La nuit, le son se propage avec une grande netteté. Or, quand la vue fait défaut, l'ouïe peut la remplacer à la rigueur.
Dans le brouillard, le son s'égare, s'étouffe et meurt.
C'est quelque chose d'inerte et de lourd, qui endort l'élasticité de l'air ; c'est quelque chose de redoutable comme cette toile, blanche aussi, qui s'appelle le suaire.
Ici, le courage même a la conscience de son impuissance. Le sang se fige, la force cède. On est à la fois submergé et fasciné.
Ceux qui ont échappé à cette terrible mort racontent des choses étranges. Ils disent que la cloche du Mont sonnant la détresse arrive parfois tout à coup à l'oreille et fait tressaillir l'agonie. Elle vibre plaintivement, et l'oreille étonnée croit l'entendre sortir des profondeurs des tangues.
Puis la cloche se tait. Un silence pesant succède à ses tristes tintements. Puis tout à coup le sable, devenu sonore comme par enchantement, apporte le bruit de la mer qui monte.
Oh ! comme elle va vite ! la mer, la mort ! Comme elle court, invisible, là-bas ! De quel côté ? On ne sait.
Près ou loin ? On ne sait.
Mais elle court, elle glisse, elle arrive.
Elle est là cachée derrière l'inconnu, au fond de ces espaces mystérieux et voilés. On l'entend qui approche et qui gronde.

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