Texte intégral du livre :

"LA FEE DES GREVES" par Paul Féval Liens vers pages suivante, précédente et sommaire du livre en bas de page.

La Fée des Grèves de Paul Féval

Un nom passa aussitôt de bouche en bouche. On disait :
-Hue de Maurever ! l'écuyer de M. Gilles ! Méloir hocha sa tête coiffée de fer, comme on fait quand le mot longtemps cherché d'une énigme vous apparaît à l'improviste. Aubry, qui respirait à peine, se tourna vers l'endroit de la nef où les dames étaient agenouillées. Reine était immobile. Les draperies de son voile semblaient taillées dans le marbre. Le prétendu moine, cependant, avait le front haut et l'oeil assuré. Il regardait en face François de Bretagne dont les paupières se baissaient. Sa voix se fit grave, et son accent plus solennel.
-En présence de la Trinité sainte, reprit-il, et devant tous ceux qui sont ici, prêtres, moines, chevaliers, écuyers, hommes-liges, servant d'armes, bourgeois et manants, moi, Hugues de Maurever, seigneur du Roz, de l'Aumône et de Saint-Jean-des-Grèves, parlant pour ton frère Gilles, assassiné lâchement, je te cite, François de Bretagne, mon seigneur, à comparaître, dans le délai de quarante jours, devant le tribunal de Dieu !
Le vieillard se tut.
Sa main droite, qui tenait un crucifix, s'éleva.
Sa main gauche sortit du froc entrouvert et jeta aux pieds de François un gantelet de buffle que chacun put reconnaître pour avoir appartenu au malheureux prince dont on fêtait les funérailles.
Pour se rendre compte de l'effet foudroyant produit par cette scène, il faut quitter le milieu sceptique où nous vivons et secouer l'atmosphère de prose lourde qui nous entoure ; il faut se reporter au lieu et au temps. Le quinzième siècle croyait : la religion entrait alors dans la vie de tous, et il n'était guère de coeur qui ne se serrât au seul mot de miracle.
Cela se passait au Mont-Saint-Michel, le rocher lugubre, cerné par la mort.
Cela se passait dans la basilique en deuil, devant le cercueil de celui-là même qui appelait son frère assassin aux pieds de la justice suprême.
Autour du cénotaphe, flanqué de ses quatre rangées de cierges,

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